La réforme territoriale est en cours. Le projet de loi devrait être débattu et voté en janvier-février 2015, pour une application en 2020. Actuellement, il existe 101 conseils généraux, un par département. Dès 2015, ils prendront le nom de conseils départementaux. Destinés à disparaître en 2020, il semblerait qu'en zone rurale une soixantaine de conseils départementaux seraient maintenus. Pour ce qui concerne la Seine-Saint-Denis, totalement incluse dans la future métropole du Grand Paris, il y aurait suppression du conseil départemental comme de tous les conseils départementaux situés dans le périmètre du Grand Paris. C'est ce que le Premier Ministre Manuel Valls a affirmé publiquement plusieurs fois, dont le 13 octobre 2014. Il y aurait par contre le maintien des intercommunalités ou des groupements d'agglomérations de plus de 300 000 habitants. Actuellement la répartition des compétences entre Etat / Grand Paris / Intercommunalités reste encore floue, ainsi que les financements nécessaires ( par fiscalité directe et/ou dotations d'Etat ). L'ensemble de la compétence économique et de la fiscalité économique serait, elle, transférée à la métropole. Les autres compétences en matière d'aide sociale (enfance, personnes handicapées, personnes âgées, prestation RSA ...) seraient dévolues aux grandes métropoles ou aux intercommunalités et fédérations d'intercommunalités. Tout cela est encore au conditionnel, nous en saurons plus dans les mois à venir.
Que deviendront les établissements et services qui dépendent actuellement du conseil général en tout ou partie ? Et particulièrement que deviendra la Prévention Spécialisée, avec de plus, une nouvelle réforme de la Protection de l'Enfance dont la proposition de loi présentée le 23 septembre 2014 devrait être examinée par le Parlement en fin d’année ?
Pour y voir plus clair, nous proposons 3 questions à un syndicaliste de la section SUD Canal Saint Denis.
1) Peux-tu nous présenter les modalités actuelles de financement des clubs de prévention spécialisée.
La prévention spécialisée est inscrite dans les missions de protection de l’enfance des Conseils Généraux (CG) qui la finance soit en totalité, soit conjointement avec les villes qui en bénéficient.
Le cadre d’intervention de la prévention spécialisée est posé pour une période de 3 à 5 ans en prenant en compte l’évolution législative nationale et des contextes départementaux et locaux. Le CG peut mettre en place des actions de prévention par régie directe, par la contractualisation avec un groupement d’intérêt public ou par le conventionnement d’associations.
2) Que t’évoque la disparation annoncée du CG93 à l’horizon 2020 ?
La disparition du CG93 à l’horizon 2020 soulève plusieurs interrogations. La première question est celle de la territorialité puisque la prévention spécialisée est une action qui s’inscrit sur un territoire local. La deuxième question porte sur le transfert des compétences. Depuis la loi du 6 janvier 1986, la compétence de l’aide sociale à l’enfance qui intègre le champ de la prévention spécialisée revient aux présidents des Conseils Généraux. Par conséquent, nous nous demandons si l’encadrement de la prévention spécialisée basculera automatiquement ou pas du CG93 à la métropole du Grand Paris.
Enfin la troisième question est celle du maintien de la proximité. En effet, il y a un risque d’éloignement du public accompagné par les acteurs/trices de la prévention spécialisée. C’est à nos yeux la crainte majeure ! Le travail que nous effectuons est avant tout un travail local, de terrain et de proximité. Le transfert dans un grand ensemble nous fait craindre des directives pouvant remettre en cause notre approche professionnelle.
3) Dans un contexte d’austérité et d’hystérie sécuritaire, quel avenir entrevois-tu pour la prévention spécialisée ?
Nous observons depuis plusieurs années, des gels de postes, des restrictions financières, une augmentation des contrôles au nom de la sacro-sainte lisibilité des actions en prévention spécialisée. Pour nous, ces mesures manifestent une mauvaise compréhension de ce qui singularise l’action éducative portée par notre mission. La rigidité budgétaire risque d’hypothéquer la souplesse et l’innovation des actions du secteur social en général et plus particulièrement de la prévention spécialisée.
En parallèle, notre spécialité professionnelle est de plus en plus interpellée pour jouer un rôle de flicage social contraire à notre déontologie. Dans certaines communes, il y a des élus municipaux qui n’hésitent pas à menacer de déconventionner des associations qui refusent de jouer le rôle d’indic’ social...