La formation professionnelle est un marché estimé à 200 milliards de dollars que nombre de pays voudraient voir inclus dans les négociations commerciales mondiales. Selon le conseil européen extraordinaire de Lisbonne en 2000, la formation a pour but « d’accroître le volume de capital humain des actifs afin d’améliorer la compétitivité de l’économie européenne », elle est soumise à la loi de la concurrence. Le remplacement du Droit Individuel à la Formation (DIF) par le Compte Personnel de Formation (CPF) s’inscrit pleinement dans cette logique marchande et d’offensive libérale !
Depuis le 1er janvier 2015, le CPF se substitue au DIF. Chaque salarié-e est invité à se créer un espace personnel sur le site : http://www.moncompteformation.gouv.fr . Derrière ce changement de sigle qui pourrait paraitre anodin, nous retrouvons la patte des libéraux de droite et de « gauche » rassemblés sous l’étendard de la flexisécurité. Pour eux la flexisecurité s’apparente à une véritable entreprise de démolition sociale. Les tenants de cette idéologie ont tiré les conclusions de leur échec après la victoire du mouvement social contre le Contrat Première et Nouvelle Embauche (CPE et CNE) et plus globalement contre le Contrat de Travail Unique en 2006. Loin d’avoir rendu les armes, ils avancent depuis une dizaine d’années par petites touches destinées à faciliter les licenciements et à détruire le droit du travail. C’est bien connu, il fautlibérer le travail pour relancer l’économie et faire croire aux salarié-es que « licencier plus c’est embaucher plus ! »…
Aujourd’hui, c’est au tour de la formation professionnelle d’être placée sous la tutelle du marché. En effet, pour les chantres de la fléxisécurité, la fluidification des licenciements et des embauches doit s’accompagner d’une adaptation permanente des salarié-es à l’évolution du marché du travail. La revendication de « se former tout au long de la vie » est ici pleinement dévoyée par une soumission au monde économique dans la mesure où la mobilisation des heures du CPF doit impérativement s’opérer par une formation qualifiante ou certifiante correspondant aux besoins de l’économie à court ou moyen terme. Jusqu’à présent, le DIF permettait aux salarié-es d’engager des actions de formations qui pouvaient être déconnectées des tâches et missions effectuées professionnellement.
A présent avec le CPF, l’offre de formation accessible pour les salarié-es est définie par des listes négociées branche par branche et adaptées régionalement suivant le code APE des entreprises. Depuis le 1er janvier, une première série de listes est disponible où l’on retrouve principalement les gros poissons du marché de la formation. Une deuxième liste devrait arriver à la fin du semestre mais pour l’instant, l’accès à des formations relevant par exemple de l’éducation populaire est tout simplement impossible…
Apres avoir resserré l’étau du champ des possibles, la mise en place du CPF ouvre le droit à la transférabilité des droits d’un emploi à un autre en passant par la case chômage. C’est en quelque sorte la contrepartie liée à la libéralisation du travail. En parallèle, le volume d’heures maximales d’ouverture de droit passe de 120 à 150h. Pour autant, nous n’observons aucune avancée permettant de rendre ce droit accessible à toutes et tous.
L’accès à l’ensemble de la formation professionnelle est un droit sous-utilisé et source d’inégalité. En 2014, l’INSEE établissait que 68 % des cadres supérieurs bénéficient de formation professionnelle contre 37% des ouvrier-es et 43% des employé-es. Ces inégalités sont également visibles suivant la taille des entreprises. Les employé-es des plus petites entreprises (de 1 à 10 salarié-es) ne sont que 34 % à avoir été formés, contre les 2/3 dans les entreprises de plus de 250 salarié-es. Ces faits ne nous étonnent pas et sans moyens financiers le CPF restera un droit caduc ouvrant la porte à toutes les dérives imaginables…
Dans de nombreuses entreprises du secteur medico-social, la construction du plan annuel de formation s’apparente à un jeu d’influences et de marchandages où le financement des formations pour les cadres dévore trop souvent l’ensemble des fonds laissant gracieusement des miettes au plus grand nombre… Pour contrer ces pratiques, notre syndicat se bat pour une réelle prise en charge financière des formations, informe les salarié-es sur les différents leviers d’action et revendique un accès égalitaire à la formation pour toutes et tous ! N’hésitez pas à solliciter les équipes syndicales Sud ou à nous rencontrer aux permanences du jeudi pour connaitre les conditions d’accès à la formation professionnelle !